Traumas religieux et spirituels : l’isolement

De manière générale, les traumas ont tendance à isoler, et développer un stress post-traumatique est favorisé par l’isolement et le manque de soutien communautaire. Dans le cas des traumas religieux et/ou spirituels, je constate des facteurs d’isolement particulièrement marquants.

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Trauma et pardon, partie 2

Première partie : Trauma et pardon, partie 1.

Le pardon prématuré est nocif

Dans certains cas, pardonner prématurément est un obstacle au rétablissement (je parle ici de rétablissement dans le cadre d’un stress post-traumatique, pour plus d’informations, voir cet article qui détaille les étapes d’un tel rétablissement, ainsi que celui-ci.). Pete Walker traite ce sujet très éloquemment dans The Tao of Fully Feeling: Harvesting Forgiveness Out Of Blame.

Un grand merci à MrsKrobb et MarieGab pour l’aide à la traduction de cet article tiré du site de Pete Walker, intitulé “Le pardon : cela commence par soi“.

Nota bene : Pete Walker parle plutôt de la situation d’abus et / ou négligences parentales dans ce texte, mais il me semble que ce qu’il explique est généralisable dans une certaine mesure. Les mises en gras sont de mon fait.


Beaucoup de « conseils » honteux, dangereux et inexacts ont été donnés au sujet du pardon ces dernières années dans la communauté du soin et dans les cercles transpersonnels*. De nombreux·ses survivant·e·s de familles dysfonctionnelles ont été blessé·e·s par les avis et conseils simplistes, binaires, qui stipulent que ces dernièr·e·s devraient adopter une position de pardon total et permanent afin de pouvoir se rétablir. Malheureusement, celleux qui ont reçu ce genre d’injonctions à excuser des abus dont iels ne se sont pas encore remis·e·s, des abus qui ont toujours lieu, et / ou des abus si odieux qu’ils ne devraient pas ou ne pourraient pas être excusés, se retrouvent dans une voie sans issue dans le processus de rétablissement. En fait, atteindre un vrai sentiment de pardon est généralement impossible lorsqu’il s’agit d’une décision prématurée. C’est parce que vouloir excuser trop tôt est une attitude qui imite l’attitude défensive du déni et de la répression. Ces personnes gardent en elles une blessure et des sentiments de colère envers l’injustice qu’elles ont vécu lors de l’enfance, et ces sentiments sont souvent inconscients.

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Prédation éphébophile et mauvaise foi

S’il y a un sujet qui met tout le monde à cran en un temps record, c’est bien la prédation éphébophile. Tout le monde veut absolument avoir un avis dessus, car tout le monde s’estime légitime à en avoir un, et on entend parfois des aberrations sans nom. J’écris cet article avec colère, épuisement, et lassitude. Mais j’espère pouvoir m’exprimer avec clarté et faire réfléchir sur ce sujet, car il y en a bien besoin.

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Trauma et pardon, partie 1

Un tweet que j’ai vu passer il y a quelque temps posait la question suivante : le pardon est-il nécessaire pour aller de l’avant ?

Réponse courte : non, pas systématiquement

Non, il n’est pas forcément nécessaire de pardonner la personne qui a abusé de nous pour aller mieux. L’idée selon laquelle on ne peut pas passer à autre chose ou pleinement guérir sans pardonner peut s’appliquer à certaines situations, mais ce n’est en aucun cas une règle d’or.

Lorsque l’on a grandi dans un milieu où le pardon est incontournable et présenté comme indispensable (par exemple, une famille chrétienne très pratiquante), cela peut être particulièrement difficile de se défaire de ce cliché, avec des conséquences parfois désastreuses. Pourquoi cela ?

La répression des émotions

Il est assez courant (pour des victimes de trauma comme pour d’autres personnes) de réprimer les émotions “encombrantes” pour ne garder que celles qui sont perçues comme socialement constructives ou socialement valorisées.

Autrement dit, si l’on a l’impression qu’être en colère ou triste n’arrangera pas la situation dans laquelle on se trouve, voire l’empirera, il est possible que l’on fasse complètement l’impasse sur nos propres ressentis pour s’occuper plutôt de ceux de nos interlocuteurices, notamment en les assurant que l’on est pas fâché·e ou blessé·e et que tout va bien. Et ce n’est pas forcément un mensonge : parfois, on a tout simplement pas pris le temps d’examiner comment l’on se sent avant de rassurer autrui.

Cette tendance à réprimer automatiquement ses émotions peut être exacerbée lorsque l’expression des émotions a été découragée chez la personne ; par exemple, si lors de l’enfance toute expression de la colère était diabolisée, les larmes fustigées comme un signe de faiblesse, etc.

Or, pour pardonner, encore faut-il prendre pleinement la mesure de ce que le pardon implique. Dans certains cas, pardonner prématurément est un obstacle au rétablissement. Ce sera le sujet d’un deuxième article à venir prochainement !

Fiche d’information sur le trauma

Je recommande régulièrement le travail du Dr Igor Thiriez, psychiatre qui publie sur son blog un grand nombre de fiches informatives précises et synthétiques. Définition de la dépression ou de la manie, tableau comparatif des effets de différents médicaments, exercices pour gérer l’agoraphobie, techniques pour gérer l’insomnie… C’est très complet et diversifié.

La plus récente fiche traite du stress post-traumatique ! J’ai eu l’immense plaisir d’apporter ma menue contribution à son élaboration.

J’aurais tant aimé avoir accès à ce type de ressources il y a cinq ou dix ans. Je me réjouis que cela existe à présent. Bonne lecture à tous·tes !

Les étapes du rétablissement

Le terme de “rétablissement” ici est une traduction de recovery et fait référence au contexte d’une personne ayant un stress post-traumatique. Le terme étant très connoté “guérison”, je me permets de vous recommander ce texte pour contextualiser ce que j’entends par là.

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Les avertissements de contenu

Pourquoi des avertissements de contenu ?

J’avais évoqué les avertissements de contenu dans un précédent article de recommandations de choses à faire et à ne pas faire avec une personne ayant un stress post-traumatique :

[…] Il est recommandé de demander plutôt quels aménagements peuvent être faits pour éviter de déclencher des symptômes chez la personne. Cela peut être fait par exemple comme cela : « Est-ce qu’il y a un sujet qu’il vaut mieux que j’évite parce que ça peut être triggering pour toi ? », « As-tu besoin d’avertissements de contenu sur certains sujets ? »

Vous avez peut-être rencontré les termes “trigger warning”, “content warning” ou leurs abbréviations “TW”, “CW”. Personnellement je les utilise peu en français car je considère que l’usage de mots anglais peu connus dans un contexte francophone alors que l’on dispose d’alternatives francophones peut prêter à confusion et se révéler excluant. Je regrette que le concept se soit diffusé principalement avec ces termes anglophones car il me semble que cela contribue aussi à l’impression qu’ont certaines personnes qu’utiliser des avertissements de contenu est compliqué et forcément réservé à certains milieux.

Quant au terme triggering, j’ai récemment décidé d’utiliser autant que possible “réactivant” ou “redéclencheur” à la place, pour les mêmes raisons, et aussi car le terme trigger et ses dérivés ont été détournés, notamment par des blagues et insultes trivialisant le sens initial (comme, hélas, la plupart du champ lexical lié à la folie : “schizo”, “bipolaire”, “maniaque”, etc). SEA Pair-Aidance a écrit un excellent article à ce sujet, que je vous recommande vivement : “Alors, tu es triggered ?“.

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13 étapes pour gérer les flashbacks

Avec la gracieuse permission de Pete Walker, j’ai traduit son texte “13 steps for managing flashbacks“, une ressource précieuse pour les personnes expérimentant des flashbacks du fait du stress post-traumatique.

Vous pouvez le télécharger la version PDF de la traduction ici.

Quelques mots sur mon expérience personnelle avec ce texte. Peut-être que vous avez l’impression que ces directives ne font qu’enfoncer des portes ouvertes, peut-être que vous êtes sceptique quant à l’efficacité de ces affirmations. Pourtant, me répéter “J’ai peur mais je ne suis pas en danger”, par exemple, a pu être d’une aide phénoménale lorsque j’étais en plein flashback. Il y a des moments où l’on a besoin d’entendre, de lire, de se répéter des évidences — des choses qu’on sait, qu’on a déjà entendues et lues. Il est fort possible que lorsque vous vous sentez bien, ces affirmations vous semblent évidentes, mais qu’au beau milieu d’un flashback, elles vous fasse l’effet d’une bouée de secours. Le refus de se haïr, de se culpabiliser ou de s’abandonner est aussi un engagement fort qui fait une énorme différence dans la gestion des flashbacks — engagement très difficile à prendre pour une personne traumatisée, qu’il faut réitérer avec persévérance, et qui devient de plus en plus facile avec le temps. Lorsque j’expérimentais des flashbacks plusieurs fois par jour, je gardais les affirmations en permanence sur moi pour pouvoir les relire. Mes encouragements à toutes les personnes qui ont des difficultés liées à des flashbacks, j’espère que cette ressource pourra vous aider.

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Intentions de rétablissement

Je trouve que ma traduction de ce texte sonne un peu bizarre… Mais le contenu est vraiment aidant ! Le C-PTSD peut provoquer une perte de repères si considérable, c’est intéressant d’avoir des formulations claires de ce que l’on souhaite. Bien sûr, ce n’est pas limité aux personnes qui souffrent de C-PTSD, et je pense que ces intentions peuvent être appropriées par d’autres. Merci Pete Walker ! Trouvez la version originale, en anglais, ici.

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