un visage dessiné en bleu, les yeux fermés, sans bouche, semble pensif ; une spirale rouge en part ; trois petits points rouges pour signifier un silence

Symptômes du stress post-traumatique complexe au quotidien

Quand j’ai fait mes premières recherches sur le stress post-traumatique il y a quelques années, je ne connaissais pas grand-chose sur le sujet ; je savais qu’il pouvait survenir des flashbacks, et c’est ce qui m’a amenée à faire des recherches. J’ai découvert des symptômes que j’expérimentais sans savoir que c’était lié au stress post-traumatique ; lire sur le trauma complexe a été une révélation.

Pour rappel, on parle de stress post-traumatique complexe (C-PTSD en anglais) lorsque les traumas qui l’ont causé ont été chroniques, sur la durée. Par exemple, quelqu’un qui a eu un grave accident développera peut-être un stress post-traumatique ; en revanche, quelqu’un qui a subi du harcèlement scolaire sur plusieurs années, des maltraitances parentales, ou été dans une relation conjugale abusive au long cours, développera probablement des symptômes similaires mais un peu différents que l’on appelle stress post-traumatique complexe. Pour plus d’informations, voir cet article.

Je me suis dit qu’il pourrait être intéressant de faire un article pour parler des symptômes du stress post-traumatique complexe, comment ça peut se présenter au quotidien. Bien sûr, il n’y a pas un modèle unique, comme d’habitude je le précise : je ne prétends pas dresser une liste exhaustive. Je me contente de donner des éléments se basant sur mes expériences et sur celles d’autres personnes ayant un stress post-traumatique complexe.

Il peut être important de garder à l’esprit que la plupart de ses symptômes peuvent fluctuer en intensité et parfois disparaître avec le temps, même dans le cas d’un stress post-traumatique complexe : on peut se retrouver dans un état aigu avec des symptômes très intenses juste après un évènement traumatisant, puis revenir à une routine de symptômes envahissants mais desquels on s’accommode plus facilement.

Pour prendre un exemple concret : juste après un traumatisme intense, quelqu’un qui a un stress post-traumatique depuis une dizaine d’années aura peut-être une résurgence de cauchemars très difficile à gérer l’empêchant de dormir correctement sans médicaments, une anxiété sociale qui limite énormément ses activités, beaucoup de difficultés à manger suffisamment, un ralentissement cognitif… Après quelques mois avec une prise en charge adaptée, cette personne aura peut-être moins de difficultés dans tous ou certains de ces domaines de sa vie.

Ainsi, il est possible qu’en lisant cette liste, vous vous dites “Oh, ça c’était moi il y a quelques années !”. Et si cela correspond à votre état actuel, que cela ne vous décourage pas, il est possible de trouver un mieux-être.

Le SPT-C au quotidien, cela peut être :

  • ne pas se reconnaître dans le miroir
  • terreur dès qu’il y a un bruit inattendu
  • alternance de rage sourde et tristesse insondable
  • une perte de poids rapide sans qu’on s’en rende compte
  • difficultés à manger, orthorexie et autres troubles du comportement alimentaire
  • avoir du mal à s’ancrer dans la réalité
  • des cauchemars à répétition
  • des absences durant une conversation
  • impossibilité de se concentrer suffisamment longtemps pour regarder un film
  • difficultés à lire de la fiction car cela convoque trop de souvenirs, de questionnements, d’identification aux protagonistes
  • tendance à projeter l’intensité de ses émotions sur autrui et en être très affecté·e (quand quelqu’un·e semble un peu déçu·e on l’imagine effondré·e, par exemple)
  • automédication (alcool, drogues…)
  • difficulté extrême à oraliser sans script (il faut se préparer à chaque conversation, on tourne une phrase dans sa tête longtemps avant d’arriver à la prononcer)
  • faire confiance à autrui paraît inenvisageable
  • les relations saines paraissent peu crédibles, surréalistes, on se prend à “attendre la chute”, on est persuadé·e que des dynamiques abusives sont tapies sous la surface
  • hypersexualité défensive, performer une certaine idée de la sexualité afin d’éviter toute situation où on devrait dire non
  • conviction profonde que l’on est sans valeur, monstrueux·se, dangereux·se pour autrui
  • terreur de ressembler aux personnes qui nous ont maltraité·e, malgré tous les efforts faits dans ce sens
  • difficulté à se convaincre que l’on est pas sali·e par les abus, obsession de la propreté
  • difficulté à sentir son propre corps, déconnexion de ses sensations corporelles
  • autodestruction relationnelle, recherche (le plus souvent inconsciente) de dynamiques malsaines car on y est habitué·e et/ou on n’est persuadé·e de ne pas mériter mieux et/ou on ne sait pas que quelque chose d’autre peut exister

Nota bene : je songe à faire un article dédié, mais vous aurez peut-être remarqué que les symptômes ressemblent aux descriptions du trouble de la personnalité borderline (TPB). Les deux diagnostics se ressemblent énormément, au point où certain·e·s survivant·e·s se sont insurgées contre le diagnostic de TPB qu’iels considèrent être une pathologisation du trauma en trouble de la personnalité qui culpabilise les survivant·e·s, en effaçant la responsabilité des violences genrées notamment. Il y aurait beaucoup à écrire sur le sujet, je me contenterai pour le moment de dire que, très pragmatiquement, les ressources sur le SPT-C et sur le TPB sont susceptibles de vous aider si vous avez reçu l’un ou l’autre des diagnostics. Si vous avez un diagnostic de trouble de la personnalité borderline, n’hésitez pas à vous renseigner sur le stress post-traumatique complexe et vice-versa.

[Avertissement de contenu pour le dessin ci-dessous : évocation à la première personne des symptômes du stress post-traumatique complexe, notamment culpabilisation, victim-blaming]

dessin en bleu foncé d'un visage les yeux fermés, sans bouche, qui semble pensif ; une spirale rouge en part ; de nombreuses phrases sont écrites, manuscrites, en rouge clair : "je ne me reconnais plus", "je veux dormir", "tout me revient", "ne jamais faire confiance", "c'est mes mains ça ?", "j'ai peur", "je suis un monstre", "je me sens en danger", "je veux oublier", "je le méritais, sûrement", "non", "pourquoi moi ?"
(Je n’ai pas mis cette version du dessin en bannière car il me semblait que cela pouvait être réactivant à voir sans avertissement)

Voir ces autres articles sur le même sujet :

11 réflexions au sujet de « Symptômes du stress post-traumatique complexe au quotidien »

  1. Merci beaucoup pour ce blog et le partage de toutes ces informations si précieuses ! D’autant plus qu’elles sont délivrées avec discernement, délicatesse, et force sagesse 🙂

    Je me permets une suggestion de lecture en anglais qui ne figure pas dans la bibliographie : “Trauma and recovery” de Judith Herman, je suis en train de le dévorer après avoir moi aussi lu Pete Walker, Bessel Van der Kolk et bien d’autres, il a énormément de mérites, dont celui d’être écrit par une femme, et qui plus est une des plus émérites dans le domaine du trauma (en particulier l’inceste dont elle a fait sa spécialité à une époque où tout le monde refusait d’en parler).
    Ce livre aborde le trauma en général, et les voies de rétablissement possibles, il explique notamment très bien la notion de stress post-traumatique complexe, il rectifie aussi pas mal d’idées préconçues et autres raccourcis habituels en thérapie, ou dans la société en général, qui portent encore trop souvent préjudice aux personnes traumatisées.
    Je le recommande chaudement !

    1. Bonjour,
      Merci beaucoup pour ce retour très encourageant 🙂

      Je me rends compte grace à ton commentaire que je n’avais pas ajouté ce livre au premier article de recommandations de lectures sur le CPTSD (celui-ci https://dcaius.fr/blog/2017/07/recommandations-de-lecture-c-ptsd/), en effet ! J’ai lu Trauma and Recovery après avoir écrit cet article, et oublié de l’ajouter. J’avais mentionné Judith L. Herman dans l’article sur les étapes du rétablissement (https://dcaius.fr/blog/2019/06/recovery-steps/) mais en le cherchant dans les archives je me rends compte aussi que certains articles ne sont pas taggués correctement, je vais corriger ça.
      Bref, merci beaucoup, en effet ce livre est excellent, je rejoins tout à fait tes observations !

  2. bonjour,

    Je découvre cet article et j’ose demander si quelqu’un connait les IRM et autres possibilité pour diagnostiquer ce trouble
    Je précise ma question aillant subi un harcellement de type pervers par ma mère et des abus sexuelles dans l’enfance avec un père psychotique et maniaco depréssif sous lithium
    A 20ans j’ai fait une décompensation et plusieurs hospitalisation puis un vrai travail de fond pdt 10 ans en psychanalyse sans traitement ni hospitalisation mais s’est mal terminé, suite à ce vide j’ai à nouveau été hospitalisé et les psychiatre n’était pas du même avis entre état limite et bi polaire, mais un spécialiste de part le lien génétique à décidé que cela était la transmission de la psychose paternel dont un de mes frère est aussi sous ttt
    reconnue bi polaire avec un lours traitement seresta depamide quétiapine valdoxant zopiclone
    J’ai une invalidité depuis 2008 et une première securité financière avec un complémént AAH
    J’ai 52 ans et ma méroire est blanche de 1an a 11ans liés a la maltraitance familiale mais suite aux multiples violences ni les médecin généraliste ni les psychiatre, psychanalyste n’ont pris en charge la gravité des mes états chroniques. Ne pouvant plus travaillé avec des problème alimentaire et de surpoids une phobie social, des sueurs froide la nuit, l’angoisse des intrusion/agression
    une hyper sensibilité, etc… tout cela semble très claire à votre lecture et je vous en remercie vivement
    s’est pourquoi je souhaite connaitre les examens radiographique pour diagnostiquer tous ce vécu ignoré et trouver des spécialiste capable de m’aider a y voir plus claire dans cette complexité à trouver une prise en charge adéquate d’autant plus qu’une nièce a vécu aussi des abus dans l’enfance de type incestueux et a déja dénoncés deux relations de violence conjugale avec procés
    Quelle structure et quelle médecin existe t il en isere(38)
    Je vais lire les livres proposés et les sites à consulté mais s’est qd même le parcours du combattant lorsque de multiples trauma depuis l’enfance s’accumule sans structure ou pressionnelle ayant les connaissances nécessaire pour aller mieux et traiter se stress post-trauma complexe

    merci à tout ceux qui divulgue et partage dans le respect ce peux nous aider vraiment sur tout les plan. Avec gratitude, anne-l’or

    1. Bonjour,
      À ma connaissance un IRM n’est pas nécessaire pour diagnostiquer un stress post-traumatique complexe.
      Je n’ai pas de recommandations de soignant·es en Isère, je ne suis pas en mesure de vous renseigner sur ce point. Je sais qu’il existe un centre à Lyon qui serait peut-être en capacité de vous orienter, le Centre Ressource Réhabilitation : https://centre-ressource-rehabilitation.org/
      Je vous envoie mes encouragements pour vos recherches.
      Bien à vous,
      dcaius

  3. Cher.e Dcaius,

    Je te remercie chaleureusement pour tout ton travail. J’ai bien lu dans le N. B. que les recoupements entre le trouble dit “borderline” (qu’il faut, selon moi, renommer de toute urgence, car on ne peut plus rigoureusement utiliser un mot qui ne veut plus rien dire, d’autant que celui-ci est particulièrement stigmatisant…) et le TSPT complexe étaient très importants, et que tu avais songé à faire un article dédié, mais je ne le trouve pas. Y as-tu finalement renoncé ?

    De mon côté, j’ai écouté très attentivement ce qu’en dit Martin Bohus, un des plus grand spécialistes du trouble dit “borderline”, et qui plaide pour une reclassification de ce trouble dans la partie “trouble lié à des traumatismes ou à des facteurs de stress” du DSM, mais c’était en 2022, et j’ai depuis vu qu’en 2023, dans “Le grand livre du trauma complexe”, Vanessa Cagnone, Nathalie Dzierzynski et Gaëlle Abgrall ont écrit, dans le chapitre intitulé “trouble de stress post-traumatique complexe et trouble de la personnalité borderline”, “qu’il reste nécessaire et pertinent de distinguer ces deux entités nosographiques, qui diffèrent par leur symptomatologie, mais surtout par leurs enjeux thérapeutiques” (je n’ai malheureusement pas pu lire le chapitre en entier sur Internet).

    Sais-tu ce qu’il en est ? En 2022, Martin Bohus (qui a du reste rédigé l’un des chapitres du même livre) affirmait “nobody can tell really, science-based, evidence-based, the difference [between borderline personality disorder and Complex-PTSD]. Les recherches ont-elles réellement avancées depuis lors ?

    1. Bonjour Eulalie,

      Merci pour ton message !

      J’ai effectivement renoncé à écrire sur le sujet, car j’estime ne pas avoir l’expertise pour le faire. Par ailleurs, depuis quelque temps, j’ai beaucoup moins le temps et l’énergie de lire et d’écrire sur les enjeux de trauma. C’est assez drainant, et vu que c’est une activité bénévole, je n’ai tout simplement plus la marge pour le faire autant que lorsque j’ai commencé ce blog. À l’époque, je n’avais absolument rien trouvé comme documentation en français sur le SPTC, mais depuis, les choses ont l’air d’avoir bougé, et c’est super ! Personnellement je n’ai pas particulièrement pu me tenir à jour. Du coup, je ne peux pas te renseigner, je n’ai pas d’avis que j’estime suffisamment informé sur l’état des recherches à ce sujet.

      Bonne continuation,

      dcaius

  4. Bonjour,

    Je tombe sur ton blog, enfin je dis “je tombe”, mais pas vraiment car je te connais d’une vidéo d’Allistair.

    J’ai eu, le 26 décembre 2022, une levée d’amnésie traumatique – que je suppose, car j’ai dû tout diagnostiquer de moi-même, comme le C-PTSD, car aucun soignant n’a pris la peine de me le dire (sauf une quand même).

    Depuis, je vis parfois l’enfer et je me sens terriblement isolé face à tout ce qui m’arrive. Je suis agoraphobe avec un trouble panique, autiste et bipolaire apparemment (récemment diagnostiqué) et d’autres choses. Mais quel abandon du système de santé français ! Quel terrible abandon !

    Enfin, je ne suis pas venu là pour me plaindre, c’est comme ça. Mais je me dois d’être honnête malgré tout, les symptômes des traumas que j’ai vécus sont si intenses que j’ai, depuis le mois de janvier, des envies de suicide assez fortes, avec un pic il y a quelques jours.

    Mais j’ai l’impression que je remonte la pente doucement.. Enfin j’essaie.

    Je voulais ajouter des symptômes que je vis fréquemment qui me font dire “je suis dans le trauma”. Les voici :

    – Comme des décharges électriques à la tête (surtout -> cerveau qui picote, sensation de décharge dans le cerveau) et dans tout le corps (horrible à vivre ça !) ;
    – Sensation de danger imminent ;
    – Nausée ;
    – Envie de vomir ;
    – Acouphènes ;
    – Impression que les sons de l’environnement sont extrêmement fort (comme si l’on avait mis le casque à fond avec les sons avec une réverbération d’une église) -> Ca fait super mal et ça renforce le figement et la crainte de nouveaux sons – chaque son c’est comme si l’on se prenait physiquement un coup tellement ça fait mal ;
    – Figement du corps : le corps se contacte, même se rétracte limite tellement c’est intense, parfois c’est une partie, comme un bras et il peut faire mal ;
    – Tremblements parfois très intenses ;
    – Avoir très froid même quand il ne fait pas plus froid que ça ;
    – Bouffées de chaleur avec parfois des sensations de brûlures à certains endroits du corps ;
    – Démangeaisons très fortes ;
    – Besoin de se brûler à l’eau chaude pour se remettre dans le présent et ressentir son corps ;
    – Sensations vertigineuses/absence ;
    – Partie du corps qui deviennent gelée (mains et pieds) où l’on sent un vent frais sur ces parties du corps ;

    J’en ajoute quelques unes que tu as noté je crois comme :

    – Dépersonnalisation/déréalisation -> sensation d’irréalité, ne plus se reconnaitre ou reconnaitre son/sa compagne ;
    – Cauchemars ;
    – Etc., etc.

    Si d’autres me reviennent, je viendrai en ajouter. Je ne vis pas tout ça d’un coup, mais parfois presque. Je cherche des techniques pour soulager ses sensations horribles immédiatement, quand elles surviennent (en ce moment je suis “dans le trauma” tous les soirs, donc je vais avoir l’occasion de m’entrainer…). Je reviendrai dans tous les cas dire ce qui a fonctionné pour moi.

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