Qu’est-ce que le stimming ?

J’avais fourni une brève définition du stimming ici. Cet article a pour but d’approfondir avec une définition un peu plus élaborée du stimming. Plusieurs articles anglophones ont été utilisés, traduits avec l’aide d’autres personnes autistes, notamment cet article par Autisticality.

Stimming est un mot anglais qui vient de “self-stimulating” (auto-stimulation).

Si le sujet du stimming vous intrigue mais que vous préférez le format vidéo, je vous recommande de visionner celle ci-dessous ; en français, avec sous-titres, 10 minutes environ.

Cette autre vidéo développe comment (ré)apprendre à stimmer.

Je recommande également les articles francophones suivants sur le sujet : Stimming et Neuroatypie de CutieWhales, Merveille des sens ou éloge du stimming par La Girafe.

Si vous souhaitez vous procurer des stim-toys (des objets conçus spécifiquement pour stimmer), Stimtastic est une boutique américaine gérée par des personnes autistes. La boutique française Hoptoys a un certain choix. Et voici quelques producteurices indépendant·e·s implanté·e·s en France (n’hésitez pas à me contacter pour que je vous ajoute à cette liste si vous produisez des stim-toys !) :

Par ailleurs, Calvin Arium tient un blog de reviews et conseils sur les stim-toys en français ! Vous pouvez le consulter ici.

Sur Twitter, le hashtag #StimLV1 a été lancé pour partager des vidéos, photos, anecdotes autour du stimming.

[Edit 09/20 : Il n’y a pas que les personnes autistes qui stimment ! Le texte traduit ci-dessous ne l’évoque pas, mais de nombreuses autres personnes neurodivergentes stimment également.]

Il y aurait beaucoup d’autres choses à dire sur le sujet, mais je vais m’arrêter là pour aujourd’hui, j’y reviendrai peut-être dans d’autres articles.

Maintenant, place à la traduction :


Qu’est-ce qu’un stim ?

C’est un comportement auto-stimulant qui est de nature typiquement répétitive. Le terme “stim” a été introduit par la communauté autistique pour réformer ce qui est généralement appelé par les professionnels “stéréotypie” et décrit dans le DSM-5 comme “mouvement moteur, utilisation d’objets ou discours stéréotypés ou répétitifs (par exemple : simple stéréotypie motrice, aligner ou renverser des objets, écholalie, phrases idiosyncratiques)“.

C’est pas très parlant… D’autres exemples ?

Bien sûr ! Les stims incluent un large éventail d’actions, comme dans la liste qui suit (non-exhaustive) :

• Battre des mains
• Se balancer
• Taper des pieds
• Se frotter le visage
• Tournoyer
• Se tortiller les doigts
• Vocalisations répétitives
• Gribouiller
• Se tripoter les cheveux
• Et bien d’autres encore ; ce site en anglais affiche une liste de 1441 stims différents !

Pourquoi les gens stimment ?

Pour beaucoup de raisons différentes ! En général cela rentre dans les catégories suivantes :

Régulation sensorielle : pour les autistes et les personnes qui souffrent de troubles de traitement sensoriel, stimmer est un moyen de fournir une impulsion sensorielle pour éviter la sous-stimulation tout comme un moyen de remplacer ou de bloquer une mauvaise sensation pour éviter une sur-stimulation.

Régulation émotionnelle : Beaucoup de personnes neurodivergentes ont recours aux stims pour assimiler ou relâcher des émotions. Un peu comme le fait de gratter une démangeaison, stimmer aide à extérioriser des émotions déplaisantes.

Expression des émotions : Les autistes voient souvent le stim comme un langage corporel autistique parce que c’est un moyen de s’exprimer. Tout comme les gens sourient quand ils sont heureux ou rient à une blague, les autistes stimment souvent pour exprimer leurs émotions. Par exemple, beaucoup d’autistes frappent dans leurs mains quand ils sont heureux.

Qui stimme ?

En un sens, tout le monde stimme. Avez-vous déjà tambouriné avec vos doigts ou tapé du pied dans une situation d’impatience ou d’ennui ? Déjà gribouillé ou cliqué avec votre stylo quand vous vous êtes ennuyé en classe ? Ces actions, comme bien d’autres, sont répétitives et apportent un élément sensoriel.
Cependant, chez les personnes neurotypiques, ces actions sont souvent cataloguées comme du gigotement. Plus encore, cette expérience pour les personnes neurotypiques semble être très différente de ce qu’expérimentent les autistes ou d’autres personnes neurodivergentes en stimmant. Les personnes autistes, hyperactives, schizophrènes, anxieuses ou avec des troubles sensoriels sont celles qui ont tendance à stimmer le plus.

Alors, qu’est-ce qui caractérise le stim autistique ?

Alors que tous les autistes n’ont pas recours aux stims, celles et ceux d’entre nous qui le font décrivons ça comme une réponse naturelle à un besoin interne comme rire à une blague ou gratter une démangeaison. Pour beaucoup d’entre nous, stimmer fait partie intégrante (et une partie magnifique) de notre autisme.

Stimmer pour les autistes est souvent nécessaire pour le bien-être émotionnel. Stimmer n’est pas seulement la façon dont nous exprimons nos émotions mais aussi un moyen de s’auto-réguler. Beaucoup d’entre nous ont des façons variées de stimmer en réponse à des états émotionnels différents et, si vous prenez le temps d’apprendre notre langage corporel, vous pourrez observer notre état émotionnel en nous regardant stimmer.

Pour nous, stimmer est un besoin. Pensez à un moment où vous avez juste eu besoin de pleurer. Vous avez sûrement été capable de retenir vos larmes pour un temps. Vos yeux vous brûlaient peut-être, votre gorge se resserrait. Le besoin de pleurer se faisant de plus en plus fort pendant que vous essayiez de vous retenir. Quand vous avez finalement terminé par craquer, il y a eu une sensation de relâchement. C’était comme si les larmes emportaient avec elles toute la souffrance.

Sinon, pensez à une démangeaison que vous ne pouviez pas gratter. La sensation se renforce et grandit jusqu’à ce que vous ne puissiez plus penser qu’à ça. Le besoin de gratter cette démangeaison devient accablante. Quand vous arrivez au moment où vous pouvez finalement vous gratter, c’est tellement de soulagement et de plaisir !
C’est comme ça que le stim peut être pour les autistes.

Pourtant, cela ne décrit pas parfaitement ce qu’est stimmer.À travers les mains qui peuvent s’agiter, le stim est un pur moment de bonheur, qui nous emporte. Le stim, c’est la paix et la tranquillité qui irradie à travers l’être quand un hamac compresse le corps et qu’on peut se balancer doucement dedans.Le pied qui ne tape pas assez vite pendant que mon cerveau est concentré sur le projet du jour, un métronome pour apaiser mes pensées : c’est du stim. La forte pression d’un câlin serré qui calme la boule d’énergie anxieuse qui pulse et tord et essore mes tripes : c’est du stim. Mes mains pressées contre ma figure quand la douleur est trop forte, un léger soulagement qui provient de la pression des mains qui frottent sur les os : c’est du stim. Frotter mes pieds l’un contre l’autre pour m’aider à m’endormir : c’est du stim. Les mains qui s’agitent et qui expriment différentes émotions selon la vitesse de répétition et où je tiens mes mains : c’est du stim. [………..]
Les stims, ce sont des émotions qui s’écoulent par le mouvement, une pure expression de soi. Stimmer, c’est comme ça que j’assimile le monde qui m’entoure. Stimmer est aussi naturel pour moi que respirer.


18 réflexions au sujet de « Qu’est-ce que le stimming ? »

  1. En bossant avec des petits enfants, je me suis souvent posée la question de savoir si en fait, stimmer ne serait pas “naturel” pour tout être humain, et “simplement” désappris en grandissant chez les personnes NT, par convention sociale.

    En effet, j’ai pas mal l’impression que tous les gosses, dans une certaine mesure (certain.e.s plus, d’autres moins) stimment en réponse aux stimulis sensoriels et émotionnels. Mais qu’on leur apprend que “ca ne se fait pas”, et que passé un certain âge, on le perçoit comme devenant “inquiétant”.

    1. Il me semble en effet que le stimming est assez “naturel” chez tout être humain. Cependant, les besoins en termes de stimming varient indéniablement. Dans tous les cas on a tout intérêt à remettre en question les normes sociales à ce sujet !

    2. Lau’, je suis d’accord avec ça, selon mes propres observations. Et je dirais que cela me paraît vrai non seulement pour les stéréotypies mais pour tout le comportement. Pour moi les autistes sont restés à un stade dont les neurotypiques n’ont pas pu faire autrement que de sortir, par pression sociale. La bienséance culturelle fait probablement bien plus de dégâts que ce qu’on pense, en retirant la liberté à chacun d’être vraiment qui il est…

      1. “Pour moi les autistes sont restés à un stade dont les neurotypiques n’ont pas pu faire autrement que de sortir, par pression sociale.”

        Je trouve la formulation extrêmement maladroite, ça sonne essentialiste et à la limite de l’insulte. En filigrane je vois la caricature typique de la personne autiste naïve et imperméable aux conventions sociales, et c’est agaçant car même si ce cliché a des racines véritables, ça ne reflète pas la variété des vécus autistes (y compris à l’échelle d’une seule vie).

        Par ailleurs, les personnes qui ne sont pas autistes ne sont pas forcément pour autant neurotypiques, c’est un non-sens ici.

  2. Bonjour, Je suis diagnostiquée TDAH et HP. Je suis allée voir la liste des 1441 types de stimming. J’en fais beaucoup. Pourtant je ne suis pas diagnostiquée autiste. Et j’ai une question : quel est la différence entre un stim et un tic ?

    1. Bonjour, le stimming n’est pas exclusif à l’autisme ! De nombreuses autres personnes neurodivergentes stimment (TDAH, schizophrénie, etc) Je me rends compte grâce à votre commentaire que ce n’était pas précisé dans cet article, je vais corriger ça. Par ailleurs il est tout à fait possible d’avoir un TDAH et d’être autiste, il y a un article qui parle des différences et similarités si cela vous intéresse d’ailleurs : https://dcaius.fr/blog/2019/02/autisme-etou-tdah/ Mais même si vous êtes certaine de ne pas être également autiste, il n’est pas du tout étonnant que vous stimmiez !
      Je n’ai pas creusé le sujet suffisamment pour en parler avec parfaite confiance, mais il me semble que le terme “tic” est utilisé par les personnes avec un syndrome de la Tourette et désigne quelque chose d’autre que le stimming. Je crois aussi que le terme “tic” est connoté négativement quand il s’agit de stimming. Cependant, je ne sais pas si la différence est si marquée que ça (entre la définition que l’on ferait d’un tic et la définition que l’on ferait du stimming), et il est possible que ce soit surtout une question de termes différents dans une optique de dépathologisation… Honnêtement, je pense que je ne suis pas la personne la mieux placée pour développer ce point précis, mes connaissances sont trop partielles et je préfère ne pas m’avancer et dire des bêtises !

      1. Merci pour cet article et ces questions, que je trouve très intéressantes… maman et formatrice, je me suis souvent posé la question de certains gestes répétitifs, je découvre la notion de stim. Mais je me pose la même question sur la différence entre tic et stim, ou encore sur le geste qui recentre sur soi-même (sans rien savoir de ce sujet, j’ai parfois proposé à certains étudiants de “jouer” avec un objet pour parvenir à se reconcentrer, je savais que c’était une technique utilisée chez les TDAH, je ne connaissais pas le terme exact) mais parfois aussi un geste qui est une stratégie d’évitement, en fait. Peut-être le même geste peut-il avoir les deux statuts chez la même personne… je vais me documenter, cela m’intéresse beaucoup

  3. Depuis l’école quand je dois rester assise (comme quand j’étais en cours) je suis jambes croisées et le pied qui est sur la jambe qui soutien se balance de manière rapide et je ne peux pas m’en empêcher sinon je ne suis pas à l’aise
    J’ai découvert mon autisme il y a peu donc je me documente
    Est-ce que ça en fait parti?
    Merci pour ce blog

    1. Bonjour,
      Oui, tout à fait. La description que vous en faites correspond à la définition du stimming. Il n’y a d’ailleurs pas de liste exhaustive de ce qui est ou non un stim !
      Bonne continuation !

  4. Bonjour
    Merci pour cet article très intéressant !
    J’ai deux questions :
    Concernant le stim comme régulation sensorielle, je pense comprendre l’intérêt d’éviter une sur-stimulation. Mais pour la sous-stimulation sensorielle, je ne suis pas sûre de comprendre le risque. Est-ce de l’ennui, de l’anxiété ou autre chose ?

    Aussi, par rapport au stim comme expression émotionnelle, vous donnez l’exemple de frapper des main comme expression de bonheur. Avez-vous d’autres exemples de stims généralement associés à telle ou telle émotion ? J’imagine que malgré la grande variété de stims, certains sont plus récurrents que d’autres dans certains états émotionnels ?

    1. Bonjour,
      Merci pour votre retour !

      En ce qui concerne la première question : la sous-stimulation peut être source d’un ennui dérangeant ou d’anxiété en effet, et provoquer de la détresse ou des difficultés de concentration. Cependant, a priori c’est moins embêtant que de la sur-stimulation.

      La joie ou l’excitation peuvent être exprimée par une variété de stims ; sautiller, battre des mains, plaquer ses mains sur ses joues, etc. En ce qui concerne la détresse, l’anxiété, parfois cela peut être se balancer, taper du pied, etc. Mais cela dépend énormément d’une personne à l’autre ; et pour certaines personnes certains stims seront utilisés pour plusieurs émotions. Je n’ai pas connaissance d’une étude à ce sujet, ou même de sondage quelconque à vrai dire !

    2. Bjr
      Merci pour l article . Quelle est la limite avec l’auto mutilation?
      Par ex s’arracher les poils ,les sourcils,se donner des petites tapes …avec des variations + ou- fortes. C est pour les parents+ difficile à supporter que battre des mains ou écholalie ou faire des bruits…tjs un pb de conformisme….

      1. Bonjour,
        Je ne suis pas certain de tout à fait comprendre votre question. Je pense que la distinction entre stimming et auto-mutilation réside dans la manière dont cela est réellement nocif pour l’individu. Par exemple, faire des battements des mains n’est pas a priori pas dommageable. Si cela devenait si frénétique que la personne avait les mains en sain, ça pourrait probablement être décrit comme de l’auto-mutilation. J’imagine que certaines personnes font cette distinction en fonction de l’intention (= la personne a-t-elle l’intention de se faire mal ou non ?).
        En tous cas, il est certainement compréhensible que l’entourage et notamment les parents s’inquiètent de gestes qui sont dangereux pour la personne et son intégrité physique ou psychique. Mais souvent, il ne s’agit pas de cela et plutôt de conformisme en effet.
        Merci pour votre retour, bonne continuation !
        dcaius

  5. Bonjour !
    Tout d’abord, c’est un article très intéressant et qui donne un bel aperçu des possibles formes de stim. Je ne faisais pas les recherches pour moi à la base, mais je me suis rendu-e compte avec pas mal de d’interrogation que je stimme (et vraiment souvent), alors que je ne suis pas du tout autiste.
    Vous avez précisé avec beaucoup de gentillesse qu’il n’y a pas que les personnes autistes qui stimment. Je suis neuro-A (hypersensible et HP) mais je ne me sens absolument pas légitime quand je le fais. Est-ce que vous auriez des liens ou des livres à me conseiller qui parlent de ce sujet ?

    Je vous remercie beaucoup pour votre article ! Bonne journée !

    1. Bonjour !
      Merci pour votre retour, c’est très appréciable !

      Je ne pense pas avoir de recommandations spécifiques aux personnes hypersensibles/HP. Cette étiquette est pas mal contestée, pas parce qu’elle n’indiquerait pas de réelles différences et difficultés, mais parce qu’elle a souvent été utilisée pour éviter de poser un autre diagnostic (souvent autisme, TDAH et/ou stress post-traumatique), et parce que son utilisation donne parfois lieu à des dérives sectaires de la part de personnes qui se posent en soignant·es. Un ami a fait une vidéo très intéressante à ce sujet : https://www.youtube.com/watch?v=gqWGtNQUzIc, il y a des articles en description qui détaillent tout cela (notamment un texte de la part de qqun qui a reçu ce diag et qui en a pâti en allant en centre spécialisé).

      Pour revenir sur le stim, il est tout à fait légitime de stimmer même si vous n’avez pas un diagnostic officiel d’autisme, ou un diagnostic officiel tout court d’ailleurs. Si vous en ressentez l’envie et/ou le besoin, et que cela ne vous met pas en danger, je ne vois pas le problème, et je trouverais particulièrement absurde que quelqu’un vous réprimande sur ce point. Cela ne fait de mal à personne de stimmer, vous ne prenez la place de personne, vous n’ôtez rien aux autres personnes neurodivergentes.

      Bien à vous,

      dcaius

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